Author: | Boleslaw Prus | ISBN: | 1230000256178 |
Publisher: | NA | Publication: | July 29, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Boleslaw Prus |
ISBN: | 1230000256178 |
Publisher: | NA |
Publication: | July 29, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
Ce livre comporte une table des matières dynamique, a été relu et corrigé.
Extrait: Anielka est une jolie fille, à qui ne manque aucune des conditions du bonheur : car elle a ses parents, une savante institutrice, son chien à elle, et elle habite la campagne. Or, la campagne, en été surtout, est l’endroit le plus favorable pour les enfants ; ils y jouissent d’une meilleure santé, de plus de liberté, et y jouent mieux qu’en ville.
À deux cents mètres du village, dont les maisons s’alignent sur deux longues rangées, s’élève une spacieuse demeure seigneuriale entourée d’un grand jardin. Dans l’un des pavillons de la maison, Anielka étudie sous l’œil de son institutrice ; Joseph, son petit frère, joue auprès de sa mère sur un grand balcon vitré donnant sur le jardin. Il est permis à Joseph de jouer même pendant les heures où tout le monde travaille, car il est tout petit encore : il n’a que sept ans.
Le village où demeure Anielka est très joli. Il est joli quand les alouettes gazouillent en s’élevant très haut au-dessus des champs, quand grince au loin le bruit sonore des faux tranchantes, quand les enfants hâlés courent sur la route en poussant des cris joyeux, quand, la leçon finie, Anielka vient au jardin avec sa mère et Joseph pour regarder, du haut d’un tertre, les champs, les prairies, le ruisseau, la route et la forêt lointaine.
Peut-être les deux enfants se disent-ils alors, avec un sentiment de fierté : « Tout ce que la vue embrasse d’ici est animé par la pensée et la volonté de notre père, — tout cela nous appartient ! Sans lui, rien ici ne serait aussi beau, rien ne respirerait l’aisance ! »
Car ils ne savent pas, ces heureux enfants, que bientôt la forêt, vendue, aura cessé d’exister, qu’il n’y aura plus de faucheurs sur la prairie, et que le bétail n’aura rien à paître dans les jachères.
Çà et là, dans les champs seigneuriaux, errent les vaches du village ; des chariots étrangers pénètrent librement dans la forêt mal gardée. Les granges sont vides ; les bâtiments tombent en ruine ; dans les greniers ne restent plus que quelques poignées de grain, éparses sur le plancher vermoulu. Les chevaux de labour hennissent dans les écuries, auprès de leurs mangeoires vides ; les valets de ferme rôdent dans la cour ; à la cuisine, on se querelle. Un domestique déclare qu’il ne mangera pas de gruau à souper, en ayant mangé deux fois déjà dans la journée ; un autre assure que son pain est plein de barbes de seigle, et plus petit qu’il ne doit l’être.
Ce livre comporte une table des matières dynamique, a été relu et corrigé.
Extrait: Anielka est une jolie fille, à qui ne manque aucune des conditions du bonheur : car elle a ses parents, une savante institutrice, son chien à elle, et elle habite la campagne. Or, la campagne, en été surtout, est l’endroit le plus favorable pour les enfants ; ils y jouissent d’une meilleure santé, de plus de liberté, et y jouent mieux qu’en ville.
À deux cents mètres du village, dont les maisons s’alignent sur deux longues rangées, s’élève une spacieuse demeure seigneuriale entourée d’un grand jardin. Dans l’un des pavillons de la maison, Anielka étudie sous l’œil de son institutrice ; Joseph, son petit frère, joue auprès de sa mère sur un grand balcon vitré donnant sur le jardin. Il est permis à Joseph de jouer même pendant les heures où tout le monde travaille, car il est tout petit encore : il n’a que sept ans.
Le village où demeure Anielka est très joli. Il est joli quand les alouettes gazouillent en s’élevant très haut au-dessus des champs, quand grince au loin le bruit sonore des faux tranchantes, quand les enfants hâlés courent sur la route en poussant des cris joyeux, quand, la leçon finie, Anielka vient au jardin avec sa mère et Joseph pour regarder, du haut d’un tertre, les champs, les prairies, le ruisseau, la route et la forêt lointaine.
Peut-être les deux enfants se disent-ils alors, avec un sentiment de fierté : « Tout ce que la vue embrasse d’ici est animé par la pensée et la volonté de notre père, — tout cela nous appartient ! Sans lui, rien ici ne serait aussi beau, rien ne respirerait l’aisance ! »
Car ils ne savent pas, ces heureux enfants, que bientôt la forêt, vendue, aura cessé d’exister, qu’il n’y aura plus de faucheurs sur la prairie, et que le bétail n’aura rien à paître dans les jachères.
Çà et là, dans les champs seigneuriaux, errent les vaches du village ; des chariots étrangers pénètrent librement dans la forêt mal gardée. Les granges sont vides ; les bâtiments tombent en ruine ; dans les greniers ne restent plus que quelques poignées de grain, éparses sur le plancher vermoulu. Les chevaux de labour hennissent dans les écuries, auprès de leurs mangeoires vides ; les valets de ferme rôdent dans la cour ; à la cuisine, on se querelle. Un domestique déclare qu’il ne mangera pas de gruau à souper, en ayant mangé deux fois déjà dans la journée ; un autre assure que son pain est plein de barbes de seigle, et plus petit qu’il ne doit l’être.