Author: | Prosper Mérimée | ISBN: | 1230000228307 |
Publisher: | Prosper Mérimée | Publication: | March 26, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Prosper Mérimée |
ISBN: | 1230000228307 |
Publisher: | Prosper Mérimée |
Publication: | March 26, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
Dans les premiers jours du mois d'octobre 181., le colonel sir Thomas Nevil,
Irlandais, officier distingué de l'armée anglaise, descendit avec sa fille à
l'hôtel Beauveau, à Marseille, au retour d'un voyage en Italie. L'admiration
continue des voyageurs enthousiastes a produit une réaction, et, pour se
singulariser, beaucoup de touristes aujourd'hui prennent pour devise le nil
admirari d'Horace. C'est à cette classe de voyageurs mécontents qu'appartenait
miss Lydia, fille unique du colonel. La Transfiguration lui avait paru médiocre,
le Vésuve en éruption à peine supérieur aux cheminées des usines de Birmingham.
En somme, sa grande objection contre l'Italie était que ce pays manquait de
couleur locale, de caractère. Explique qui pourra le sens de ces mots, que je
comprenais fort bien il y a quelques années, et que je n'entends plus
aujourd'hui. D'abord, miss Lydia s'était flattée de trouver au-delà des Alpes
des choses que personne n'aurait vues avant elle, et dont elle pouvait parler
avec les honnêtes gens, comme dit M. Jourdain. Mais bientôt, partout devancée
par ses compatriotes, et désespérant de rencontrer rien d'inconnu, elle se jeta
dans le parti de l'opposition. Il est bien désagréable, en effet, de ne pouvoir
parler des merveilles de l'Italie sans que quelqu'un ne vous dise: « Vous
connaissez sans doute ce Raphaël du palais ***, à ***? C'est ce qu'il y a de
plus beau en Italie. » - Et c'est justement ce qu'on a négligé de voir. Comme il
est trop long de tout voir, le plus simple c'est de tout condamner de parti pris.
EXTRAIT:
Dans les premiers jours du mois d'octobre 181., le colonel sir Thomas Nevil,
Irlandais, officier distingué de l'armée anglaise, descendit avec sa fille à
l'hôtel Beauveau, à Marseille, au retour d'un voyage en Italie. L'admiration
continue des voyageurs enthousiastes a produit une réaction, et, pour se
singulariser, beaucoup de touristes aujourd'hui prennent pour devise le nil
admirari d'Horace. C'est à cette classe de voyageurs mécontents qu'appartenait
miss Lydia, fille unique du colonel. La Transfiguration lui avait paru médiocre,
le Vésuve en éruption à peine supérieur aux cheminées des usines de Birmingham.
En somme, sa grande objection contre l'Italie était que ce pays manquait de
couleur locale, de caractère. Explique qui pourra le sens de ces mots, que je
comprenais fort bien il y a quelques années, et que je n'entends plus
aujourd'hui. D'abord, miss Lydia s'était flattée de trouver au-delà des Alpes
des choses que personne n'aurait vues avant elle, et dont elle pouvait parler
avec les honnêtes gens, comme dit M. Jourdain. Mais bientôt, partout devancée
par ses compatriotes, et désespérant de rencontrer rien d'inconnu, elle se jeta
dans le parti de l'opposition. Il est bien désagréable, en effet, de ne pouvoir
parler des merveilles de l'Italie sans que quelqu'un ne vous dise: « Vous
connaissez sans doute ce Raphaël du palais ***, à ***? C'est ce qu'il y a de
plus beau en Italie. » - Et c'est justement ce qu'on a négligé de voir. Comme il
est trop long de tout voir, le plus simple c'est de tout condamner de parti pris.