Author: | William Shakespeare | ISBN: | 1230000229576 |
Publisher: | William Shakespeare | Publication: | March 31, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | William Shakespeare |
ISBN: | 1230000229576 |
Publisher: | William Shakespeare |
Publication: | March 31, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
ACTE PREMIER
SCÈNE I
Verger, près de la maison d'Olivier.
Entrent ORLANDO ET ADAM.
ORLANDO.- Je me rappelle bien, Adam; tel a été mon legs, une misérable somme de mille écus dans son testament; et, comme tu dis, il a chargé mon frère, sous peine de sa malédiction, de me bien élever, et voilà la cause de mes chagrins. Il entretient mon frère Jacques à l'école, et la renommée parle magnifiquement de ses progrès. Pour moi, il m'entretient au logis en paysan, ou pour mieux dire, il me garde ici sans aucun entretien; car peut-on appeler entretien pour un gentilhomme de ma naissance, un traitement qui ne diffère en aucune façon de celui des boeufs à l'étable ? Ses chevaux sont mieux traités; car, outre qu'ils sont très-bien nourris, on les dresse au manége; et à cette fin on paye bien cher des écuyers: moi, qui suis son frère, je ne gagne sous sa tutelle que de la croissance: et pour cela les animaux qui vivent sur les fumiers de la basse-cour lui sont aussi obligés que moi; et pour ce néant qu'il me prodigue si libéralement, sa conduite à mon égard me fait perdre le peu de dons réels que j'ai reçus de la nature. Il me fait manger avec ses valets; il m'interdit la place d'un frère, et il dégrade autant qu'il est en lui ma distinction naturelle par mon éducation. C'est là, Adam, ce qui m'afflige. Mais l'âme de mon père, qui est, je crois, en moi, commence à se révolter contre cette servitude. Non, je ne l'endurerai pas plus longtemps, quoique je ne connaisse pas encore d'expédient raisonnable et sûr pour m'y soustraire.
(Olivier survient.)
ADAM.- Voilà votre frère, mon maître, qui vient.
ORLANDO.- Tiens-toi à l'écart, Adam, et tu entendras comme il va me secouer.
OLIVIER.- Eh bien ! monsieur, que faites-vous ici ?
ORLANDO.- Rien: on ne m'apprend point à faire quelque chose.
OLIVIER.- Que gâtez-vous alors, monsieur ?
ORLANDO.- Vraiment, monsieur, je vous aide à gâter ce que Dieu a fait, votre pauvre misérable frère, à force d'oisiveté.
OLIVIER.- Que diable ! monsieur occupez-vous mieux, et en attendant soyez un zéro.
ORLANDO.- Irai-je garder vos pourceaux et manger des carouges avec eux ? Quelle portion de patrimoine ai-je follement dépensée, pour en être réduit à une telle détresse ?
EXTRAIT:
ACTE PREMIER
SCÈNE I
Verger, près de la maison d'Olivier.
Entrent ORLANDO ET ADAM.
ORLANDO.- Je me rappelle bien, Adam; tel a été mon legs, une misérable somme de mille écus dans son testament; et, comme tu dis, il a chargé mon frère, sous peine de sa malédiction, de me bien élever, et voilà la cause de mes chagrins. Il entretient mon frère Jacques à l'école, et la renommée parle magnifiquement de ses progrès. Pour moi, il m'entretient au logis en paysan, ou pour mieux dire, il me garde ici sans aucun entretien; car peut-on appeler entretien pour un gentilhomme de ma naissance, un traitement qui ne diffère en aucune façon de celui des boeufs à l'étable ? Ses chevaux sont mieux traités; car, outre qu'ils sont très-bien nourris, on les dresse au manége; et à cette fin on paye bien cher des écuyers: moi, qui suis son frère, je ne gagne sous sa tutelle que de la croissance: et pour cela les animaux qui vivent sur les fumiers de la basse-cour lui sont aussi obligés que moi; et pour ce néant qu'il me prodigue si libéralement, sa conduite à mon égard me fait perdre le peu de dons réels que j'ai reçus de la nature. Il me fait manger avec ses valets; il m'interdit la place d'un frère, et il dégrade autant qu'il est en lui ma distinction naturelle par mon éducation. C'est là, Adam, ce qui m'afflige. Mais l'âme de mon père, qui est, je crois, en moi, commence à se révolter contre cette servitude. Non, je ne l'endurerai pas plus longtemps, quoique je ne connaisse pas encore d'expédient raisonnable et sûr pour m'y soustraire.
(Olivier survient.)
ADAM.- Voilà votre frère, mon maître, qui vient.
ORLANDO.- Tiens-toi à l'écart, Adam, et tu entendras comme il va me secouer.
OLIVIER.- Eh bien ! monsieur, que faites-vous ici ?
ORLANDO.- Rien: on ne m'apprend point à faire quelque chose.
OLIVIER.- Que gâtez-vous alors, monsieur ?
ORLANDO.- Vraiment, monsieur, je vous aide à gâter ce que Dieu a fait, votre pauvre misérable frère, à force d'oisiveté.
OLIVIER.- Que diable ! monsieur occupez-vous mieux, et en attendant soyez un zéro.
ORLANDO.- Irai-je garder vos pourceaux et manger des carouges avec eux ? Quelle portion de patrimoine ai-je follement dépensée, pour en être réduit à une telle détresse ?