Author: | Henryk Sienkiewicz | ISBN: | 1230000256397 |
Publisher: | NA | Publication: | July 30, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Henryk Sienkiewicz |
ISBN: | 1230000256397 |
Publisher: | NA |
Publication: | July 30, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
Extrait: Elle alluma un bout de cierge, prit l’enfant, l’aspergea d’eau bénite froide, qui le fit cligner des yeux, puis prononça solennellement :
— Je te baptise au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit et te donne le nom de Jean ; et maintenant, âme chrétienne, retourne au ciel d’où tu viens. Amen !
Mais cette âme chrétienne n’avait aucune envie, paraît-il, de retourner au paradis et d’abandonner le pauvre petit corps maigre qu’elle habitait. Au contraire, l’enfant agita nerveusement les bras et les pieds et commença à pleurer si doucement et si plaintivement qu’on aurait cru l’entendre dire :
— Quelle absurdité de croire que je vais quitter la terre !
On envoya chercher le curé. Il arriva en carriole, fit son devoir et repartit. L’accouchée se sentit un peu mieux. Au bout d’une semaine, elle allait déjà aux champs ; quant à l’enfant, il végéta à peine, mais il végéta. Lorsque le coucou chanta son quatrième printemps, il se rétablit suffisamment pour atteindre sa dixième année.
*
Il était maigre, tout hâlé du soleil, avec un ventre boursouflé et des joues pendantes ; des toupets de cheveux, aussi blancs que du lin, lui tombaient sur les yeux ou se hérissaient, tout ébouriffés. Son regard clair était pensif. L’hiver, il était assis près du poêle et pleurait doucement de froid ou de faim — de faim, surtout, quand sa mère n’avait rien à faire cuire, — ce qui arrivait souvent.
En été, il était habillé d’une simple chemise,
Extrait: Elle alluma un bout de cierge, prit l’enfant, l’aspergea d’eau bénite froide, qui le fit cligner des yeux, puis prononça solennellement :
— Je te baptise au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit et te donne le nom de Jean ; et maintenant, âme chrétienne, retourne au ciel d’où tu viens. Amen !
Mais cette âme chrétienne n’avait aucune envie, paraît-il, de retourner au paradis et d’abandonner le pauvre petit corps maigre qu’elle habitait. Au contraire, l’enfant agita nerveusement les bras et les pieds et commença à pleurer si doucement et si plaintivement qu’on aurait cru l’entendre dire :
— Quelle absurdité de croire que je vais quitter la terre !
On envoya chercher le curé. Il arriva en carriole, fit son devoir et repartit. L’accouchée se sentit un peu mieux. Au bout d’une semaine, elle allait déjà aux champs ; quant à l’enfant, il végéta à peine, mais il végéta. Lorsque le coucou chanta son quatrième printemps, il se rétablit suffisamment pour atteindre sa dixième année.
*
Il était maigre, tout hâlé du soleil, avec un ventre boursouflé et des joues pendantes ; des toupets de cheveux, aussi blancs que du lin, lui tombaient sur les yeux ou se hérissaient, tout ébouriffés. Son regard clair était pensif. L’hiver, il était assis près du poêle et pleurait doucement de froid ou de faim — de faim, surtout, quand sa mère n’avait rien à faire cuire, — ce qui arrivait souvent.
En été, il était habillé d’une simple chemise,