Author: | James Olivier Curwood | ISBN: | 1230002793177 |
Publisher: | GILBERT TEROL | Publication: | November 4, 2018 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | James Olivier Curwood |
ISBN: | 1230002793177 |
Publisher: | GILBERT TEROL |
Publication: | November 4, 2018 |
Imprint: | |
Language: | French |
Dans la confortable maison où il se trouvait à cette heure, Kazan était couché, muet et immobile, son museau gris reposant entre les griffes de ses deux pattes de devant, et les yeux mi-clos.
Il semblait pétrifié comme un bloc de rocher. Pas un muscle de son corps ne bougeait, pas un de ses poils ne remuait, ses paupières n’avaient pas un clignotement.
Et cependant, sous cette apparente immobilité, chaque goutte du sang sauvage qui coulait dans les veines de son corps splendide frémissait en une émotion intense, inconnue de lui jusque-là. Chaque fibre de ses muscles puissants était tendue comme un fil d’acier.
Les quatre ans d’existence que comptait Kazan, chez qui il y avait un quart de loup et trois quarts de chien husky, s’étaient entièrement écoulées dans les immenses et blanches solitudes de la Terre du Nord. Là il avait connu les affres de la faim, là il avait subi le gel et le froid. Il avait écouté le gémissement des vents sur les Barrens et s’était aplati, sous le craquement terrible de la tempête, au bruit du tonnerre des torrents et des cataractes. Sa gorge et ses flancs portaient les cicatrices des batailles qu’il avait livrées et, sous la morsure de la neige, ses yeux s’étaient injectés de sang.
On l’appelait « Kazan », le chien sauvage. Il était un géant parmi ses frères de race et son indomptable endurance ne le cédait en rien à celle des hommes qui le conduisaient, attelé à un traîneau, à travers les mille périls d’un monde glacé.
Toujours Kazan avait ignoré la peur. Jamais il n’avait éprouvé le désir de fuir. Pas même en ce jour tragique où, dans la forêt de sapins, il avait combattu contre un gros lynx gris, que finalement il avait tué.
Ici, dans cette maison, il ne savait pas ce qui l’effrayait. Et pourtant il avait peur. Il se rendait compte seulement qu’il se trouvait transplanté dans un univers totalement différent de celui où il avait toujours vécu, et où des tas de choses inconnues le faisaient frémir et l’alarmaient.
C’était son premier contact avec la civilisation. Et il attendait, anxieux, que son maître revint dans la pièce étrange où il l’avait laissé.
La chambre en question était remplie d’objets singulièrement troublants. Il y avait surtout, accrochées aux murs, dans des cadres dorés, de grandes faces humaines, qui ne remuaient ni ne parlaient, mais qui le fixaient du regard comme personne encore ne l’avait jamais fait. Il se souvenait bien d’un de ses anciens maîtres, qu’il avait vu gisant sur la neige, immobile et froid comme ces mêmes figures. Et, après l’avoir longtemps flairé, il s’était rassis sur son derrière, en lançant au loin son lugubre chant de la mort. Mais les gens appendus au mur, qui l’entouraient, avaient le regard d’êtres vivants. Cependant ils ne bougeaient pas plus que s’ils étaient morts.
Kazan, soudain, dressa légèrement les oreilles. Il entendit des pas, puis des voix qui parlaient bas. L’une des deux voix était celle de son maître. Quant à l’autre… Un frémissement avait couru dans son corps en l’écoutant.
C’était une voix de femme, une voix rieuse. Et il lui semblait se ressouvenir, comme dans un rêve, d’une voix semblable, qui portait en elle douceur et bonheur, et qui avait, au temps lointain de son enfance, résonné ainsi à son oreille.
Il souleva la tête, tandis qu’entraient son maître et celle qui l’accompagnait. Et il les fixa tous deux, de ses yeux rougeâtres.
Il connut ainsi que la jeune femme était chère au maître, car celui-ci l’enlaçait de son bras. À la lumière des flammes du foyer, il vit que la chevelure de la jolie créature était blonde et dorée, que son visage était rose comme la vigne d’automne et que ses yeux brillants étaient pareils à deux fleurs bleues.
Lorsqu’elle l’aperçut, elle poussa un petit cri et s’élança vers lui.
— Arrête chère amie ! jeta vivement le maître, et sois prudente. La bête est dangereuse…
Mais, déjà, la jeune femme s’était agenouillée près de Kazan, fine et mignonne comme un oiseau, et si jolie, avec ses yeux qui s’illuminaient merveilleusement et ses petites mains prêtes à se poser sur le gros chien.
Kazan, tout perplexe, se demandait ce qu’il lui convenait de faire. Devait-il contracter ses muscles, prêt à s’élancer et à mordre ? La femme était-elle de la nature des choses menaçantes appendues au mur, et son ennemie ? Fallait-il, sans tarder, bondir vers sa gorge blanche et l’étrangler ?
Il vit le maître qui se précipitait, pâle comme la mort…
Sans s’effrayer cependant, la jeune femme avait descendu sa main sur la tête de Kazan, dont tous les nerfs du corps avaient frémi à cet attouchement. Dans ses deux mains elle prit la tête du chien-loup et la tourna vers elle. Puis, inclinant tout près son visage, elle murmura, en proie à une violente émotion :
Dans la confortable maison où il se trouvait à cette heure, Kazan était couché, muet et immobile, son museau gris reposant entre les griffes de ses deux pattes de devant, et les yeux mi-clos.
Il semblait pétrifié comme un bloc de rocher. Pas un muscle de son corps ne bougeait, pas un de ses poils ne remuait, ses paupières n’avaient pas un clignotement.
Et cependant, sous cette apparente immobilité, chaque goutte du sang sauvage qui coulait dans les veines de son corps splendide frémissait en une émotion intense, inconnue de lui jusque-là. Chaque fibre de ses muscles puissants était tendue comme un fil d’acier.
Les quatre ans d’existence que comptait Kazan, chez qui il y avait un quart de loup et trois quarts de chien husky, s’étaient entièrement écoulées dans les immenses et blanches solitudes de la Terre du Nord. Là il avait connu les affres de la faim, là il avait subi le gel et le froid. Il avait écouté le gémissement des vents sur les Barrens et s’était aplati, sous le craquement terrible de la tempête, au bruit du tonnerre des torrents et des cataractes. Sa gorge et ses flancs portaient les cicatrices des batailles qu’il avait livrées et, sous la morsure de la neige, ses yeux s’étaient injectés de sang.
On l’appelait « Kazan », le chien sauvage. Il était un géant parmi ses frères de race et son indomptable endurance ne le cédait en rien à celle des hommes qui le conduisaient, attelé à un traîneau, à travers les mille périls d’un monde glacé.
Toujours Kazan avait ignoré la peur. Jamais il n’avait éprouvé le désir de fuir. Pas même en ce jour tragique où, dans la forêt de sapins, il avait combattu contre un gros lynx gris, que finalement il avait tué.
Ici, dans cette maison, il ne savait pas ce qui l’effrayait. Et pourtant il avait peur. Il se rendait compte seulement qu’il se trouvait transplanté dans un univers totalement différent de celui où il avait toujours vécu, et où des tas de choses inconnues le faisaient frémir et l’alarmaient.
C’était son premier contact avec la civilisation. Et il attendait, anxieux, que son maître revint dans la pièce étrange où il l’avait laissé.
La chambre en question était remplie d’objets singulièrement troublants. Il y avait surtout, accrochées aux murs, dans des cadres dorés, de grandes faces humaines, qui ne remuaient ni ne parlaient, mais qui le fixaient du regard comme personne encore ne l’avait jamais fait. Il se souvenait bien d’un de ses anciens maîtres, qu’il avait vu gisant sur la neige, immobile et froid comme ces mêmes figures. Et, après l’avoir longtemps flairé, il s’était rassis sur son derrière, en lançant au loin son lugubre chant de la mort. Mais les gens appendus au mur, qui l’entouraient, avaient le regard d’êtres vivants. Cependant ils ne bougeaient pas plus que s’ils étaient morts.
Kazan, soudain, dressa légèrement les oreilles. Il entendit des pas, puis des voix qui parlaient bas. L’une des deux voix était celle de son maître. Quant à l’autre… Un frémissement avait couru dans son corps en l’écoutant.
C’était une voix de femme, une voix rieuse. Et il lui semblait se ressouvenir, comme dans un rêve, d’une voix semblable, qui portait en elle douceur et bonheur, et qui avait, au temps lointain de son enfance, résonné ainsi à son oreille.
Il souleva la tête, tandis qu’entraient son maître et celle qui l’accompagnait. Et il les fixa tous deux, de ses yeux rougeâtres.
Il connut ainsi que la jeune femme était chère au maître, car celui-ci l’enlaçait de son bras. À la lumière des flammes du foyer, il vit que la chevelure de la jolie créature était blonde et dorée, que son visage était rose comme la vigne d’automne et que ses yeux brillants étaient pareils à deux fleurs bleues.
Lorsqu’elle l’aperçut, elle poussa un petit cri et s’élança vers lui.
— Arrête chère amie ! jeta vivement le maître, et sois prudente. La bête est dangereuse…
Mais, déjà, la jeune femme s’était agenouillée près de Kazan, fine et mignonne comme un oiseau, et si jolie, avec ses yeux qui s’illuminaient merveilleusement et ses petites mains prêtes à se poser sur le gros chien.
Kazan, tout perplexe, se demandait ce qu’il lui convenait de faire. Devait-il contracter ses muscles, prêt à s’élancer et à mordre ? La femme était-elle de la nature des choses menaçantes appendues au mur, et son ennemie ? Fallait-il, sans tarder, bondir vers sa gorge blanche et l’étrangler ?
Il vit le maître qui se précipitait, pâle comme la mort…
Sans s’effrayer cependant, la jeune femme avait descendu sa main sur la tête de Kazan, dont tous les nerfs du corps avaient frémi à cet attouchement. Dans ses deux mains elle prit la tête du chien-loup et la tourna vers elle. Puis, inclinant tout près son visage, elle murmura, en proie à une violente émotion :