Le testament de Monsieur d’Erquoy

Romance, Historical
Cover of the book Le testament de Monsieur d’Erquoy by Delly, Classica Libris
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Author: Delly ISBN: 9788829572953
Publisher: Classica Libris Publication: December 11, 2018
Imprint: Language: French
Author: Delly
ISBN: 9788829572953
Publisher: Classica Libris
Publication: December 11, 2018
Imprint:
Language: French

Raymonde rejoignit sa tante qui causait dans la rue avec une de ses protégées. Mademoiselle Mathilde Dalrey, petite femme blonde à l’air doux et effacé, était fort aimée des humbles, qui connaissaient bien son dévouement et sa bonté, et en abusaient même parfois.
L’entretien terminé, Raymonde prit le bras de sa tante, et toutes deux se dirigèrent vers le logis. Raymonde, chemin faisant, raconta ce qu’elle avait appris de Justine Plautin, et Mademoiselle Mathilde décida qu’elle tenterait l’épreuve chez la femme Baujoux.
Bientôt, elles arrivèrent à l’extrémité de l’avenue Victor-Hugo, l’unique avenue de la jolie petite cité normande de Palerville. Là s’élevaient des villas de belle apparence. Mais tout au bout, faisant tache sur cet ensemble très moderne, se dressait un vieux pignon qui avait bénéficié, pour rester debout quand même, de la chance de se trouver juste à l’alignement. Sur les murs décrépits et zébrés de larges traînées noirâtres, un peu de lierre grimpait, une aristoloche essayait timidement de s’émanciper, vite réfrénée par la main impitoyable du maître de céans qui n’aimait pas la verdure, « ce nid à insectes ».
Cette demeure s’appelait la Bercière. Depuis des siècles, elle appartenait à la famille d’Erquoy. Le propriétaire actuel, Monsieur Albéric d’Erquoy, un célibataire d’une soixantaine d’années, y vivait seul avec un vieux domestique à moitié sourd. On l’appelait « l’ours de la Bercière », ou bien encore « l’avare », et ces deux surnoms lui convenaient parfaitement, il faut le reconnaître. Bien qu’on l’assurât millionnaire, il portait des vêtements élimés, ne s’accordait qu’une maigre nourriture et refusait toujours son obole pour les œuvres de bienfaisance. On le voyait rarement hors de son logis. Il s’occupait d’études scientifiques, et n’avait de relations – encore étaient-elles espacées et peu intimes – qu’avec un vieil ingénieur retraité et un châtelain voisin de Palerville, tous deux savants comme lui.
Cependant, Monsieur d’Erquoy avait de la famille. D’abord le fils d’un de ses cousins germains, Paul d’Erquoy, qui occupait un poste élevé dans un ministère, bien qu’il eût à peine trente ans ; puis Danielle d’Erquoy, fille d’un autre cousin au même degré, qu’il avait naguère presque reniée lorsqu’elle s’était obstinée à épouser, malgré lui, le riche industriel Raymond Dalrey. Peu après, Madame Dalrey, veuve et ruinée, était venue le supplier de l’aider.

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Raymonde rejoignit sa tante qui causait dans la rue avec une de ses protégées. Mademoiselle Mathilde Dalrey, petite femme blonde à l’air doux et effacé, était fort aimée des humbles, qui connaissaient bien son dévouement et sa bonté, et en abusaient même parfois.
L’entretien terminé, Raymonde prit le bras de sa tante, et toutes deux se dirigèrent vers le logis. Raymonde, chemin faisant, raconta ce qu’elle avait appris de Justine Plautin, et Mademoiselle Mathilde décida qu’elle tenterait l’épreuve chez la femme Baujoux.
Bientôt, elles arrivèrent à l’extrémité de l’avenue Victor-Hugo, l’unique avenue de la jolie petite cité normande de Palerville. Là s’élevaient des villas de belle apparence. Mais tout au bout, faisant tache sur cet ensemble très moderne, se dressait un vieux pignon qui avait bénéficié, pour rester debout quand même, de la chance de se trouver juste à l’alignement. Sur les murs décrépits et zébrés de larges traînées noirâtres, un peu de lierre grimpait, une aristoloche essayait timidement de s’émanciper, vite réfrénée par la main impitoyable du maître de céans qui n’aimait pas la verdure, « ce nid à insectes ».
Cette demeure s’appelait la Bercière. Depuis des siècles, elle appartenait à la famille d’Erquoy. Le propriétaire actuel, Monsieur Albéric d’Erquoy, un célibataire d’une soixantaine d’années, y vivait seul avec un vieux domestique à moitié sourd. On l’appelait « l’ours de la Bercière », ou bien encore « l’avare », et ces deux surnoms lui convenaient parfaitement, il faut le reconnaître. Bien qu’on l’assurât millionnaire, il portait des vêtements élimés, ne s’accordait qu’une maigre nourriture et refusait toujours son obole pour les œuvres de bienfaisance. On le voyait rarement hors de son logis. Il s’occupait d’études scientifiques, et n’avait de relations – encore étaient-elles espacées et peu intimes – qu’avec un vieil ingénieur retraité et un châtelain voisin de Palerville, tous deux savants comme lui.
Cependant, Monsieur d’Erquoy avait de la famille. D’abord le fils d’un de ses cousins germains, Paul d’Erquoy, qui occupait un poste élevé dans un ministère, bien qu’il eût à peine trente ans ; puis Danielle d’Erquoy, fille d’un autre cousin au même degré, qu’il avait naguère presque reniée lorsqu’elle s’était obstinée à épouser, malgré lui, le riche industriel Raymond Dalrey. Peu après, Madame Dalrey, veuve et ruinée, était venue le supplier de l’aider.

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