Author: | Gustave Aimard, Henri Crisafulli | ISBN: | 1230002414607 |
Publisher: | Paris : Amyot, 1867 | Publication: | July 7, 2018 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Gustave Aimard, Henri Crisafulli |
ISBN: | 1230002414607 |
Publisher: | Paris : Amyot, 1867 |
Publication: | July 7, 2018 |
Imprint: | |
Language: | French |
Depuis le Diable boiteux jusqu’aux Mémoires du Diable, bien des romans ont paru octroyant à leurs héros le don d’ubiquité fantastique.
Tout en admirant l’ingéniosité gracieuse, l’invention spirituelle de Lesage, l’immortel auteur de Gil-Blas, le père et le premier de nos romanciers, tout en rendant ample justice à la vigueur fiévreuse, à l’imagination ardente et multiple de Frédéric Soulié, l’un de nos écrivains les plus regrettés, nous ne procéderons pas de la même façon qu’eux.
Autres temps, autres lecteurs, autres œuvres.
La tâche ardue que nous entreprenons étant une reproduction exacte de faits vrais, longs et nombreux anneaux d’une chaîne fatale, se rattachant les uns aux autres par la force des choses, nous ne ferons intervenir ni Satan, ni Astaroth dans notre entrée en matière.
Ces pauvres diables sont bien usés en l’an de grâce et de paix où nous vivons. La génération qui nous succède et nous chasse n’a plus en eux la foi naïve de notre enfance ; ils sont passés ces jours de fête, où Méphistophélès s’en donnait à cœur joie sur les Faust petits et grands de la vieille Allemagne et de la jeune France.
Aujourd’hui, pour exister, il est obligé de faire constater son identité par huissier.
Certes, aujourd’hui, la plus timide, la mieux élevée de nos jeunes filles, coryphée des mazurkas du grand monde, ou le plus idiot de nos aimables gandins, conducteur de cotillon ou marqueur de steeplechase, rirait bien à votre nez et à votre barbe, si vous lui jouiez la fonte des balles du Freyschütz en le priant d’évoquer le Belzébuth de Weber ; oui il rirait bien et vous répondrait la bouche en cœur et de sa plus douce voix : En chasse, en chasse, ma petite vieille, tu peux te fouiller ! c’est dans le nez que ça m’chatouille.
Cela, ou autres gentillesses à l’usage des salons du Vaudeville.
Si vous le voulez, nous nous y prendrons autrement, à la façon simple de ce bon Rétif de la Bretonne, l’auteur de tant de livres si bien lus et si bien oubliés, l’auteur, entre autres du Spectateur nocturne, recueil de vérités ayant toutes l’apparence de mensonges.
Singulière existence que celle de ce laborieux romancier !
Amoureux de son intérieur, de son at home, il se vit obligé de toujours vivre par voies et par chemins ; nature morale et intelligente, il écrivit des centaines de volumes légers et frivoles, sacrifiant son goût ou plutôt ses goûts aux appétits grossiers d’un public déjà blasé, faute de force pour les lui imposer ! Sisyphe de lettres qui ne parvint jamais à caler son rocher sur cette haute cime qu’on appelle le succès et qui donne gloire ou fortune.
Que nos lecteurs se rassurent toutefois : si nous prenons Rétif de la Bretonne pour modèle, ce ne sera que comme un modèle de vérité et de réalisme.
Les Invisibles de Paris étant un roman essentiellement actuel et parisien, malgré toute notre bonne volonté pour notre prédécesseur, il nous serait impossible de penser et de parler comme lui.
Nous ne reculons pas devant le récit le plus compliqué et le plus extraordinaire qu’on ait offert à la curiosité publique ; nous espérons que les curieux nous tiendront compte de nos recherches, de notre travail et de notre conscience.
Extrait: Où Passe-Partout entre en scène.
La nuit du dimanche gras, carnaval de l’année 1847, l’auteur du Spectateur nocturne eût eu fort à faire et beaucoup à voir, entre minuit et une heure, si, témoin occulte, du haut d’un observatoire central comme la lanterne du Panthéon, il avait pu s’intéresser simultanément à ce qui se passa, dans ce court espace de temps, barrière de Fontainebleau, rue Beaujon, sur le Pont-Royal et dans une impasse avoisinant le Marché-aux-Chevaux.
Malheureusement, ainsi que nous venons de le constater, depuis un demi-siècle à peu près, Rétif de la Bretonne et son œuvre dorment et se reposent dans la poussière de l’oubli ; et dans le monde où sans doute plane son âme curieuse et taquine, le vieux rôdeur de nuit ne songe plus guère aux choses d’ici-bas.
Nous essayerons donc de le remplacer, en décrivant de notre mieux les quatre scènes étranges et mystérieuses qui, tout en se composant d’éléments hétérogènes, forment les quatre assises de notre histoire.
Sur la route de Paris à Villejuif, à une centaine de pas de la barrière de Fontainebleau, un ouvrier vêtu d’une blouse bleue et d’un pantalon de toile de même couleur, un béret basque enfoncé jusqu’aux sourcils, un cigare à la bouche, se promenait de long en large, envoyant de temps à autre une bouffée de fumée en l’air, et paraissant s’occuper aussi peu du carnaval qui s’en va que du carême qui arrive.
Et cependant c’est l’heure du plaisir ou du sommeil ; celle de la flânerie est passée, celle des affaires le paraît encore plus.
Oh ! Paris, ville de ténèbres et de lumières, réceptacle de toutes les fanges et de toutes les gloires tu n’as pas de plus chère complice que la nuit ! il se taille plus de besogne dans ton giron à la pâle et blanche clarté des étoiles qu’aux rayons du soleil ! Tu protèges les travailleurs de ces heures mystérieuses !
Ah ! tes rues, désertes et calmes en apparence, cachent plus de mouvement et de passions, plus de rires et de sanglots, plus de grincements de dents et d’espérances menteuses, que ne pourra jamais en inventer l’imagination du romancier le plus fécond !
Depuis près de vingt minutes déjà, notre promeneur allait d’un arbre à l’autre, sans dépasser la limite qu’il devait s’être tracée mentalement.
Il ne témoignait aucune impatience de sa solitude et de sa longue attente.
PROLOGUE - A VOL D’OISEAU
I - Où Passe-Partout entre en scène.
II - Un enlèvement qui n’est pas ee qu’il parait être.
III - Reproduction d’un tableau de Gérôme.
IV - Où il est démontré que le carnaval n’est pas gai pour tout le monde.
LES INVISIBLES DE PARIS
I - Ce qui se passait dans un cabinet particulier de la rôtisseuse Basset, dans la nuit du samedi au dimanche gras 1847.
II - Où l’Inconnu lève un peu son masque.
III - Un bal à l’hôtel de Warrens.
IV - Apparition d’une étoile que M. Leverrier n’aurait pas découverte.
V - Ce que peut cacher un manteau vénitien.
VI - L’Invisible.
VII - Echec au roi, échec à la reine, échec. la police.
VIII - Où le lecteur fait connaissance avec Monchette.
IX - Où Bâton taquine Bertrand.
X - La Réveilleuse.
XI - Le Messager de l’Invisible
XII - Coquillard on Charbonneau ?
XIII - Une Providence borgne.
XIV - Le chien et son maître.
XV - Les deux Gaspard.
Depuis le Diable boiteux jusqu’aux Mémoires du Diable, bien des romans ont paru octroyant à leurs héros le don d’ubiquité fantastique.
Tout en admirant l’ingéniosité gracieuse, l’invention spirituelle de Lesage, l’immortel auteur de Gil-Blas, le père et le premier de nos romanciers, tout en rendant ample justice à la vigueur fiévreuse, à l’imagination ardente et multiple de Frédéric Soulié, l’un de nos écrivains les plus regrettés, nous ne procéderons pas de la même façon qu’eux.
Autres temps, autres lecteurs, autres œuvres.
La tâche ardue que nous entreprenons étant une reproduction exacte de faits vrais, longs et nombreux anneaux d’une chaîne fatale, se rattachant les uns aux autres par la force des choses, nous ne ferons intervenir ni Satan, ni Astaroth dans notre entrée en matière.
Ces pauvres diables sont bien usés en l’an de grâce et de paix où nous vivons. La génération qui nous succède et nous chasse n’a plus en eux la foi naïve de notre enfance ; ils sont passés ces jours de fête, où Méphistophélès s’en donnait à cœur joie sur les Faust petits et grands de la vieille Allemagne et de la jeune France.
Aujourd’hui, pour exister, il est obligé de faire constater son identité par huissier.
Certes, aujourd’hui, la plus timide, la mieux élevée de nos jeunes filles, coryphée des mazurkas du grand monde, ou le plus idiot de nos aimables gandins, conducteur de cotillon ou marqueur de steeplechase, rirait bien à votre nez et à votre barbe, si vous lui jouiez la fonte des balles du Freyschütz en le priant d’évoquer le Belzébuth de Weber ; oui il rirait bien et vous répondrait la bouche en cœur et de sa plus douce voix : En chasse, en chasse, ma petite vieille, tu peux te fouiller ! c’est dans le nez que ça m’chatouille.
Cela, ou autres gentillesses à l’usage des salons du Vaudeville.
Si vous le voulez, nous nous y prendrons autrement, à la façon simple de ce bon Rétif de la Bretonne, l’auteur de tant de livres si bien lus et si bien oubliés, l’auteur, entre autres du Spectateur nocturne, recueil de vérités ayant toutes l’apparence de mensonges.
Singulière existence que celle de ce laborieux romancier !
Amoureux de son intérieur, de son at home, il se vit obligé de toujours vivre par voies et par chemins ; nature morale et intelligente, il écrivit des centaines de volumes légers et frivoles, sacrifiant son goût ou plutôt ses goûts aux appétits grossiers d’un public déjà blasé, faute de force pour les lui imposer ! Sisyphe de lettres qui ne parvint jamais à caler son rocher sur cette haute cime qu’on appelle le succès et qui donne gloire ou fortune.
Que nos lecteurs se rassurent toutefois : si nous prenons Rétif de la Bretonne pour modèle, ce ne sera que comme un modèle de vérité et de réalisme.
Les Invisibles de Paris étant un roman essentiellement actuel et parisien, malgré toute notre bonne volonté pour notre prédécesseur, il nous serait impossible de penser et de parler comme lui.
Nous ne reculons pas devant le récit le plus compliqué et le plus extraordinaire qu’on ait offert à la curiosité publique ; nous espérons que les curieux nous tiendront compte de nos recherches, de notre travail et de notre conscience.
Extrait: Où Passe-Partout entre en scène.
La nuit du dimanche gras, carnaval de l’année 1847, l’auteur du Spectateur nocturne eût eu fort à faire et beaucoup à voir, entre minuit et une heure, si, témoin occulte, du haut d’un observatoire central comme la lanterne du Panthéon, il avait pu s’intéresser simultanément à ce qui se passa, dans ce court espace de temps, barrière de Fontainebleau, rue Beaujon, sur le Pont-Royal et dans une impasse avoisinant le Marché-aux-Chevaux.
Malheureusement, ainsi que nous venons de le constater, depuis un demi-siècle à peu près, Rétif de la Bretonne et son œuvre dorment et se reposent dans la poussière de l’oubli ; et dans le monde où sans doute plane son âme curieuse et taquine, le vieux rôdeur de nuit ne songe plus guère aux choses d’ici-bas.
Nous essayerons donc de le remplacer, en décrivant de notre mieux les quatre scènes étranges et mystérieuses qui, tout en se composant d’éléments hétérogènes, forment les quatre assises de notre histoire.
Sur la route de Paris à Villejuif, à une centaine de pas de la barrière de Fontainebleau, un ouvrier vêtu d’une blouse bleue et d’un pantalon de toile de même couleur, un béret basque enfoncé jusqu’aux sourcils, un cigare à la bouche, se promenait de long en large, envoyant de temps à autre une bouffée de fumée en l’air, et paraissant s’occuper aussi peu du carnaval qui s’en va que du carême qui arrive.
Et cependant c’est l’heure du plaisir ou du sommeil ; celle de la flânerie est passée, celle des affaires le paraît encore plus.
Oh ! Paris, ville de ténèbres et de lumières, réceptacle de toutes les fanges et de toutes les gloires tu n’as pas de plus chère complice que la nuit ! il se taille plus de besogne dans ton giron à la pâle et blanche clarté des étoiles qu’aux rayons du soleil ! Tu protèges les travailleurs de ces heures mystérieuses !
Ah ! tes rues, désertes et calmes en apparence, cachent plus de mouvement et de passions, plus de rires et de sanglots, plus de grincements de dents et d’espérances menteuses, que ne pourra jamais en inventer l’imagination du romancier le plus fécond !
Depuis près de vingt minutes déjà, notre promeneur allait d’un arbre à l’autre, sans dépasser la limite qu’il devait s’être tracée mentalement.
Il ne témoignait aucune impatience de sa solitude et de sa longue attente.
PROLOGUE - A VOL D’OISEAU
I - Où Passe-Partout entre en scène.
II - Un enlèvement qui n’est pas ee qu’il parait être.
III - Reproduction d’un tableau de Gérôme.
IV - Où il est démontré que le carnaval n’est pas gai pour tout le monde.
LES INVISIBLES DE PARIS
I - Ce qui se passait dans un cabinet particulier de la rôtisseuse Basset, dans la nuit du samedi au dimanche gras 1847.
II - Où l’Inconnu lève un peu son masque.
III - Un bal à l’hôtel de Warrens.
IV - Apparition d’une étoile que M. Leverrier n’aurait pas découverte.
V - Ce que peut cacher un manteau vénitien.
VI - L’Invisible.
VII - Echec au roi, échec à la reine, échec. la police.
VIII - Où le lecteur fait connaissance avec Monchette.
IX - Où Bâton taquine Bertrand.
X - La Réveilleuse.
XI - Le Messager de l’Invisible
XII - Coquillard on Charbonneau ?
XIII - Une Providence borgne.
XIV - Le chien et son maître.
XV - Les deux Gaspard.