Author: | Alfred Dreyfus | ISBN: | 1230000285645 |
Publisher: | JCA | Publication: | December 14, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Alfred Dreyfus |
ISBN: | 1230000285645 |
Publisher: | JCA |
Publication: | December 14, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
Mardi, 5 décembre 1894.Ma chère Lucie, Enfin je puis t’écrire un
mot, on vient de me signifier ma mise en jugement pour le 19 de ce mois. On
me refuse le droit de te voir. Je ne veux pas te décrire tout ce que j’ai
souffert, il n’y a pas au monde de termes assez saisissants pour cela. Te
rappelles-tu quand je te disais combien nous étions heureux ? Tout nous
souriait dans la vie. Puis tout à coup un coup de foudre épouvantable, dont
mon cerveau est encore ébranlé. Moi, accusé du crime le plus monstrueux
qu’un soldat puisse commettre ! Encore aujourd’hui je me crois le jouet d’un
cauchemar épouvantable.
Mais j’espère en Dieu et en la justice, la vérité finira bien par se
faire jour. Ma conscience est calme et tranquille, elle ne me reproche rien. J’
ai toujours fait mon devoir, jamais je n’ai fléchi la tête. J’ai été accablé,
atterré dans ma prison sombre, en tête à tête avec mon cerveau ; j’ai eu des
moments de folie farouche, j’ai même divagué, mais ma conscience veillait.
Elle me disait : « Haut la tête et regarde le monde en face ! Fort de ta
conscience, marche droit et relève-toi ! C’est une épreuve épouvantable,
mais il faut la subir. »
Je ne t’écris pas plus longuement, car je veux que cette lettre parte
ce soir. Écris-moi longuement, écris-moi tout ce que font les nôtres.
Je t’embrasse mille fois comme je t’aime, comme je t’adore, ma Lucie chérie.
Mille baisers aux enfants. Je n’ose pas t’en parler plus longuement, les pleurs
me viennent aux yeux en pensant à eux. Écris-moi vite.
Mardi, 5 décembre 1894.Ma chère Lucie, Enfin je puis t’écrire un
mot, on vient de me signifier ma mise en jugement pour le 19 de ce mois. On
me refuse le droit de te voir. Je ne veux pas te décrire tout ce que j’ai
souffert, il n’y a pas au monde de termes assez saisissants pour cela. Te
rappelles-tu quand je te disais combien nous étions heureux ? Tout nous
souriait dans la vie. Puis tout à coup un coup de foudre épouvantable, dont
mon cerveau est encore ébranlé. Moi, accusé du crime le plus monstrueux
qu’un soldat puisse commettre ! Encore aujourd’hui je me crois le jouet d’un
cauchemar épouvantable.
Mais j’espère en Dieu et en la justice, la vérité finira bien par se
faire jour. Ma conscience est calme et tranquille, elle ne me reproche rien. J’
ai toujours fait mon devoir, jamais je n’ai fléchi la tête. J’ai été accablé,
atterré dans ma prison sombre, en tête à tête avec mon cerveau ; j’ai eu des
moments de folie farouche, j’ai même divagué, mais ma conscience veillait.
Elle me disait : « Haut la tête et regarde le monde en face ! Fort de ta
conscience, marche droit et relève-toi ! C’est une épreuve épouvantable,
mais il faut la subir. »
Je ne t’écris pas plus longuement, car je veux que cette lettre parte
ce soir. Écris-moi longuement, écris-moi tout ce que font les nôtres.
Je t’embrasse mille fois comme je t’aime, comme je t’adore, ma Lucie chérie.
Mille baisers aux enfants. Je n’ose pas t’en parler plus longuement, les pleurs
me viennent aux yeux en pensant à eux. Écris-moi vite.