Author: | Théophile Gautier | ISBN: | 1230002986852 |
Publisher: | Paris, Charpentier, 1845 | Publication: | December 11, 2018 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Théophile Gautier |
ISBN: | 1230002986852 |
Publisher: | Paris, Charpentier, 1845 |
Publication: | December 11, 2018 |
Imprint: | |
Language: | French |
Il y a quelques semaines (avril 1840), j’avais laissé tomber négligement cette phrase: “J’irais volontiers en Espagne!” Au bout de cinq ou six jours, mes amis avaient ôté le prudent conditionnel dont j’avais mitigé mon désir et répétaient à qui voulait l’entendre que j’allais faire un voyage en Espagne. À cette formule positive succéda l’interrogation ” Quand partez-vous?” Je répondis, sans savoir à quoi je m’engageais: ” Dans huit jours.” Les huit jours passés, les gens manifestaient un étonnement de me voir encore à Paris. “Je vous croyais à Madrid, disait l’un. - Êtes-vous revenu?” demandait l’autre. Je compris que je devais à mes amis une absence de plusieurs mois, et qu’il fallait acquitter cette dette au plus vite, sous peine d’être harcelé sans répit par ces créanciers officieux ; le foyer des théâtres, les divers asphaltes et bitumes élastiques des boulevards m’étaient interdits jusqu’à nouvel ordre : tout ce que je pus obtenir fut un13 délai de trois ou quatre jours, et le 5 mai je commençai à débarasser ma patrie de ma présence importune, en grimpant dans la voiture de Bordeaux…
Il y a quelques semaines (avril 1840), j’avais laissé tomber négligement cette phrase: “J’irais volontiers en Espagne!” Au bout de cinq ou six jours, mes amis avaient ôté le prudent conditionnel dont j’avais mitigé mon désir et répétaient à qui voulait l’entendre que j’allais faire un voyage en Espagne. À cette formule positive succéda l’interrogation ” Quand partez-vous?” Je répondis, sans savoir à quoi je m’engageais: ” Dans huit jours.” Les huit jours passés, les gens manifestaient un étonnement de me voir encore à Paris. “Je vous croyais à Madrid, disait l’un. - Êtes-vous revenu?” demandait l’autre. Je compris que je devais à mes amis une absence de plusieurs mois, et qu’il fallait acquitter cette dette au plus vite, sous peine d’être harcelé sans répit par ces créanciers officieux ; le foyer des théâtres, les divers asphaltes et bitumes élastiques des boulevards m’étaient interdits jusqu’à nouvel ordre : tout ce que je pus obtenir fut un13 délai de trois ou quatre jours, et le 5 mai je commençai à débarasser ma patrie de ma présence importune, en grimpant dans la voiture de Bordeaux…