Author: | GERARD DE NERVAL | ISBN: | 1230000211139 |
Publisher: | GILBERT TEROL | Publication: | January 20, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | GERARD DE NERVAL |
ISBN: | 1230000211139 |
Publisher: | GILBERT TEROL |
Publication: | January 20, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
Nous allons vous raconter la folie d’un personnage fort singulier, qui vécut vers le milieu du XVIe siècle. Raoul Spifame, seigneur Des Granges, était un suzerain sans seigneurie, comme il y en avait tant déjà dans cette époque de guerres et de ruines qui frappaient toutes les hautes maisons de France. Son père ne lui laissa que peu de fortune, ainsi qu’à ses frères Paul et Jean, tous deux célèbres, depuis, à différents titres ; de sorte que Raoul, envoyé très jeune à Paris, étudia les lois et se fit avocat. Lorsque le roi Henri deuxième succéda à son glorieux père François, ce prince vint en personne, après les vacances judiciaires qui suivirent son avènement, assister à la rentrée des chambres du parlement. Raoul Spifame tenait une modeste place aux derniers rangs de l’assemblée, mêlé à la tourbe des légistes inférieurs, et portant pour toute décoration sa brassière de docteur en droit. Le roi était assis plus haut que le premier président, dans sa robe d’azur semée de France, et chacun admirait la noblesse et l’agrément de sa figure, malgré la pâleur maladive qui distinguait tous les princes de cette race. Le discours latin du vénérable chancelier fut très long ce jour-là. Les yeux distraits du prince, las de compter les fronts penchés de l’assemblée et les solives sculptées du plafond, s’arrêtèrent enfin longtemps sur un seul assistant placé tout à l’extrémité de la salle, et dont un rayon de soleil illuminait en plein la figure originale ; si bien que peu à peu tous les regards se dirigèrent aussi vers le point qui semblait exciter l’attention du prince. C’était Raoul Spifame qu’on examinait ainsi.
Nous allons vous raconter la folie d’un personnage fort singulier, qui vécut vers le milieu du XVIe siècle. Raoul Spifame, seigneur Des Granges, était un suzerain sans seigneurie, comme il y en avait tant déjà dans cette époque de guerres et de ruines qui frappaient toutes les hautes maisons de France. Son père ne lui laissa que peu de fortune, ainsi qu’à ses frères Paul et Jean, tous deux célèbres, depuis, à différents titres ; de sorte que Raoul, envoyé très jeune à Paris, étudia les lois et se fit avocat. Lorsque le roi Henri deuxième succéda à son glorieux père François, ce prince vint en personne, après les vacances judiciaires qui suivirent son avènement, assister à la rentrée des chambres du parlement. Raoul Spifame tenait une modeste place aux derniers rangs de l’assemblée, mêlé à la tourbe des légistes inférieurs, et portant pour toute décoration sa brassière de docteur en droit. Le roi était assis plus haut que le premier président, dans sa robe d’azur semée de France, et chacun admirait la noblesse et l’agrément de sa figure, malgré la pâleur maladive qui distinguait tous les princes de cette race. Le discours latin du vénérable chancelier fut très long ce jour-là. Les yeux distraits du prince, las de compter les fronts penchés de l’assemblée et les solives sculptées du plafond, s’arrêtèrent enfin longtemps sur un seul assistant placé tout à l’extrémité de la salle, et dont un rayon de soleil illuminait en plein la figure originale ; si bien que peu à peu tous les regards se dirigèrent aussi vers le point qui semblait exciter l’attention du prince. C’était Raoul Spifame qu’on examinait ainsi.